Le 8 octobre dernier, le Sénat a adopté un rapport de la délégation aux droits des femmes sur les femmes sans abri en France. Un phénomène en augmentation qui touche également la Guyane, où 250 personnes sans domicile ont été recensées, dont un cinquième de femmes venant majoritairement du Maroc, de Syrie et d’Afghanistan. L’objectif de la délégation est de mieux connaître et de repérer ces femmes, afin de leur assurer une solution d’hébergement sécuritaire, 22 propositions ont été formulées.

Le nombre de sans abri a doublé en 10 ans en France, pour atteindre 330.000, dont 120.000 femmes. La délégation aux droits des femmes du Sénat à l’origine du rapport d’information sur les femmes sans domicile adopté le 8 octobre dernier, a organisé une table ronde concernant cette problématique Outre-mer. Un phénomène plus marginal, mais également en augmentation d’après la délégation, dont la sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth est rapporteure. “Les interlocuteurs entendus ont tous témoigné de l’augmentation de cette problématique sur leurs territoires, en lien avec une précarité élevée ainsi qu’avec une augmentation du nombre de femmes migrantes”, indique le rapport.
En Guyane, 250 personnes sans domicile ont été recensées par le Guichet unique de rue (GUR), “dont 52 femmes, venant majoritairement du Maroc, de Syrie et d’Afghanistan. Ces femmes, principalement âgées de 26 à 40 ans, sont exposées aux violences, aux agressions sexuelles et à la prostitution qui constitue l’un des vecteurs importants de propagation du VIH sur le territoire”, indique le rapport qui cite Isabelle Hidair-Krivsky, anthropologue et directrice régionale aux droits des femmes et à l’égalité. “Lors de son audition, Isabelle Hidair-Krivsky précisait que la Guyane comptait 51 places d’hébergement disponibles pour les femmes victimes de violences, mais que ces places étaient insuffisantes au regard des besoins exprimés. La plupart des associations doivent dès lors recourir aux nuitées d’hôtel et aux locations de gîte pour répondre aux demandes d’urgence. Elle estimait également que ‘les femmes rencontrent de nombreux obstacles qui affectent leur vie quotidienne, que ce soit pour l’accès à l’eau, aux douches, pour déposer plainte, pour obtenir une domiciliation, un hébergement ou un lieu sûr pour protéger leurs effets personnels et éviter les violences et les vols. Ces difficultés accentuent la marginalisation et la stigmatisation des femmes vivant dans la rue’ ”, poursuit le document.

Propositions

Afin d’enrayer ce phénomène, la délégation a formulé dans son rapport 22 propositions. Parmi elles, les rapporteures estiment important de systématiser les analyses genrées et le questionnement des violences subies par les femmes sans abri. Elles souhaitent également attribuer à l’État la responsabilité de l’hébergement des femmes enceintes et des mères isolées, de créer 10.000 places d’hébergement supplémentaires et d’améliorer la qualité de l’offre d’hébergement transformant des nuitées hôtelières en places pérennes et en développant les places adaptées aux femmes et aux familles, avec en particulier : davantage de places non mixtes pour les femmes isolées ; des places adaptées à toutes les configurations familiales, préservant l’unité familiale ; des lieux permettant de cuisiner, de disposer d’une intimité et d’accueillir des enfants”, établit le rapport.
Le rapport recommande également de faciliter l’accès au logement (accroître la construction, critères prioritaires pour les femmes seules et mères isolées, donner aux bailleurs sociaux les moyens d’identifier ces publics fragilisés, renforcer les programmes spécialisés d’accès direct au logement), d’accompagner les femmes dans l’accès aux droits en améliorant la détection, en mobilisant les préfets pour développer les parcours de sortie de prostitution pour les femmes étrangères en situation irrégulière victimes de réseaux de traite des êtres humains et de prostitution, et porter la durée de l’autorisation provisoire de séjour, accordée en cas de PSP, de six mois à un an. De créer au sein des préfectures, un guichet unique dédié au traitement des demandes de délivrance ou de renouvellement de titres de séjour déposées par des femmes étrangères isolées et sans domicile. Il est également recommandé de faciliter l’accès aux services du quotidien et aux démarches administratives, de développer le statut de travailleur social, de développer la formation continue et enfin de renforcer les soutiens financiers aux associations.
(Claudia Ledezert)